Jeudi 06 Juin 2024, le magazine économique "les Echos" a publié une article complet sur le baromètre de la colocation 2024.
La colocation semblait auparavant réservée aux étudiants. L'essor de la mobilité dans la vie professionnelle rebat les cartes de la colocation et profite aux propriétaires de biens spacieux.
Les jeunes actifs, déjà habitués aux colocations durant leurs études, n'hésitent plus à se tourner vers la vie en communauté.Ils ont 30 ans, arrivent dans une nouvelle ville pour se saisir d'une opportunité professionnelle, loin de leurs amis et de leur famille. Souvent débarqués dans une métropole où les loyers flambent, ces jeunes actifs n'ont d'autre choix que de réduire la surface de leur appartement, et se tourner vers des studios. A moins qu'ils ne soient tentés par la vie en communauté.
Une aubaine pour les propriétaires, qui peuvent espérer diversifier le profil de leurs locataires et maximiser les bénéfices des biens les plus spacieux. La possibilité de diviser un bien est aussi l'assurance d'une meilleure rentabilité par rapport à une location nue à destination d'une famille. La majorité des colocations proposées ont entre 3 et 4 chambres.
Celles ayant plus de 5 chambres représentent 20 % de l'offre nationale, selon un baromètre publié par le spécialiste de la location Oqoro.
Une opportunité pour les bailleurs
Une autre solution permettant d'augmenter les profits est de se tourner vers le coliving, ces colocations d'un nouveau genre, proche de l'hôtellerie. Une chambre peut alors être proposée « aussi chère qu'un studio », note Adrien Faure, cofondateur d'Oqoro. Ces locations partagées promettent l'accès à un immeuble ou une maison dans le coeur d'une ville, avec des prestations luxueuses : séances de sport, service de ménage, partage de voitures et vélos, internet haut débit, café dans les communs ou abonnements aux services de streaming. Ces logements sont prisés des actifs désireux d'une vie en communauté, principalement pour de très courtes périodes de mobilité.
La gestion du turnover et des prestations est exigeante pour le propriétaire, mais la formule présente d'autres avantages. Si, comme les locations classique, les colocations sont soumises au plafonnement des loyers dans certaines grandes villes, il est facile de justifier un surplus vu les aménagements haut de gamme assortis à ce type de logement. Les jeunes actifs, sensibles au confort, semblent les plus susceptibles de les rechercher.
Car la colocation attire désormais non seulement les étudiants mais aussi 44 % d'actifs salariés et même une part croissante de retraités (3 %). Les jeunes dans le supérieur ne représentent plus que la moitié de la population des colocations en France. Auparavant, cette frange de la population était largement majoritaire dans les logements partagés.
La moitié des colocataires sont âgés de 18 à 24 ans et plus de 10 % d'entre eux ont plus de 35 ans. La moyenne d'âge de ces lieux de vie continue donc d'augmenter, pour atteindre 27 ans.
L'arrivée de ces nouveaux locataires, avec des revenus, rassure les propriétaires. Les garants évoluent par rapport à la location meublée classique de studios à destination d'étudiants.
Près de 30 % des candidats aux colocations n'ont pas de garants, grâce à des revenus suffisants. Les jeunes en emplois précaires, contrairement aux étudiants soutenus par leurs parents, se tournent vers la garantie Visale. Cette protection, pourtant peu sollicitée par les étudiants , reste une solution rassurante pour les propriétaires.
La raison de cette nouvelle population ? La colocation est un « bon moyen de tisser des liens lorsque l'on est un professionnel en mobilité », d'autant que de nombreux jeunes actifs connaissent le fonctionnement d'une colocation grâce à leurs études et n'y sont plus réticents, s'enthousiasme Adrien Faure. Mais les raisons de cette attractivité sont aussi financières. « L'inflation a touché le portefeuille des jeunes actifs qui repoussent l'achat dans les grandes villes. Quant à la location, certains refusent un studio trop petit pour préférer plus d'espace, quitte à le partager ».
Jeunes habitués des coloc'
Les baux de colocation ne cessent de s'allonger grâce aux actifs, dont 25 % sont en CDI. « En fonction de la typologie, les locataires restent désormais entre 12 et 24 mois », remarque Adrien Faure. D'autant que l'avantage financier est significatif pour les occupants. Pour un studio meublé, le loyer moyen national est de 557 euros par mois selon les données d'Oqoro, soit 13 % plus cher que la colocation, qui enregistre un loyer moyen d'une chambre en colocation de 492 euros par mois.
Les charges sont également environ 30 % inférieures pour les locataires. Le site de location calcule donc qu'il faudrait débourser 780 euros de plus par an pour bénéficier de la tranquillité d'un logement individuel . Cela n'empêche pas de retrouver les tendances régionales, avec des prix pour une chambre variant du simple au double en fonction des villes.
Les villes les plus chères sont, sans surprise, Paris avec une moyenne de 756 euros par chambre. Puis vient Annemasse, dont la proximité avec le bassin Genevois fait augmenter les tarifs pour les travailleurs frontaliers, repoussés par des « loyers suisses devenus franchement inabordables », analyse-t-on chez Oqoro. Les chambres, majoritairement habitées par de jeunes travailleurs, se négocient à 704 euros en moyenne. Le trio suivant est composé de Nice à 661 euros mensuel, Lyon à 566 euros et enfin Bordeaux, où il faudra débourser 563 euros pour une chambre au mois.
A contrario, les trois grandes villes les moins chères de France sont Saint-Etienne, Brest et Le Havre. Leur loyer est inférieur ou dépasse à peine les 400 euros, soit près de 25 % de moins que le loyer moyen français en colocation.
Avec ces nouveaux profils, la tension locative sur cette typologie de bien augmente. Paris présente la tension locative la plus élevée avec en moyenne 14 demandes par chambre disponible ; suivie par Lyon et Bordeaux avec respectivement 11 demandes par chambre.
Cette hausse de la demande garantie pour les propriétaires une rotation soutenue et la possibilité de garantir un revenu même au moment du départ de l'un des occupants. Adrien Faure remarque que « de plus en plus de colocations se font à la demande du propriétaire et non plus des locataires ».